The Heartbeat of France
Portrait d'Yves Klein réalisé à l'occasion du tournage de Peter Morley "The Heartbeat of France", 1961  Studio de Charles Wilp, Düsseldorf, Allemagne
© Photo : Charles Wilp / BPK, Berlin
Né le 28 avril 1928 à Nice, Yves Klein avait pour première vocation d'être judoka. En 1954, il se tourne définitivement vers l'art et entame son « Aventure monochrome ».

Animé par l’idée consistant à « libérer la couleur de la prison de la ligne », Yves Klein se tourne vers la monochromie car c’est pour lui la seule manière de peindre permettant de « voir ce que l’absolu avait de visible ».

Privilégiant l’expression de la sensibilité plus que la figuration dans la forme, Yves Klein va au-delà de toute représentation artistique et conçoit l'œuvre d'art comme la trace de la communication de l'artiste avec le monde. C'est la réalité invisible qui devient visible. Ses œuvres sont « les cendres de son art ».

L'œuvre d'Yves Klein révèle une conception nouvelle de la fonction de l'artiste. Selon lui, la beauté existe déjà, à l'état invisible. Sa tâche consiste à la saisir partout où elle est, dans l'air et dans la matière. Yves Klein a fait de sa vie tout entière une œuvre d’art.

Dans sa quête d’immatérialité et d’infini, Yves Klein adopte le bleu outremer comme véhicule. De ce bleu plus que bleu, qu’il nommera « IKB » (International Klein Blue), irradie une vibration colorée qui n’engage pas seulement le regard du spectateur : c’est l’esprit qui voit avec les yeux.

De ses monochromes, au vide, à la "technique des pinceaux vivants" ou "Anthropométrie", jusqu'à l'emploi des éléments de la nature afin de manifester leur force créatrice ou de l’or qu’il utilise comme un passage vers l’absolu, il a conçu une œuvre qui traverse les frontières de l'art conceptuel, corporel et du happening.

Juste avant de mourir, Yves Klein confie à un ami : "Je vais entrer dans le plus grand atelier du monde. Et je n'y ferai que des œuvres immatérielles."

Entre mai 1954 et le 6 juin 1962, date de sa mort, Yves Klein aura brûlé sa vie pour réaliser une œuvre flamboyante qui a marqué son époque et qui rayonne encore aujourd’hui.

Chronologie

1928

Yves Klein est né à Nice le 28 avril 1928, de parents peintres – Fred Klein, peintre figuratif et Marie Raymond, peintre abstrait.


1928 – 1946

Pendant son enfance, la famille Klein habite entre Paris et Nice.


1947

Durant l’été, en s’inscrivant au club de judo du quartier général de la Police, Yves Klein fait la connaissance de Claude Pascal et d’Armand Fernandez, le futur Arman. Réunis par un grand attrait pour l'exercice physique, ils aspirent tous les trois à « l'Aventure » du voyage, de la création, de la spiritualité. Le judo fut pour Yves la première expérience de l'espace "spirituel".

Sur la plage de Nice, les trois amis choisissent de "se partager le monde" : à Armand revient la terre et ses richesses, à Claude Pascal l'air, et à Yves le ciel et son infini.


1948 – 1954

Pendant l'été 1948, Klein visite l'Italie (Gênes, Portofino, Pise, Rome, Capri, Naples...).

En novembre 1948, il part pour onze mois de service militaire en Allemagne.

Fin 1949, Claude Pascal et Yves Klein s'installent provisoirement à Londres où ils poursuivent leurs activités de judo. Yves trouve un emploi chez l'encadreur Robert Savage. Le séjour chez Savage sera pour lui un apprentissage de la rigueur dans le travail. Yves apprend alors la dorure à la feuille d'or.

A cette époque, Yves crée quelques monochromes sur papier et sur carton en utilisant le pastel et la gouache. Il imagine également une Symphonie Monoton-Silence et écrit des scénarios de films sur l’art.

En 1951, Yves Klein part pour Madrid afin d'y étudier l'espagnol. Inscrit dans un club de judo, Klein remplace un moniteur et remplit dès lors cette fonction régulièrement. Il devient très proche du directeur de l'école Fernando Franco de Sarabia, dont le père est éditeur.

Grâce à l'aide de sa tante, il part au Japon en 1952 et s'inscrit à l'Institut Kôdôkan, le plus prestigieux centre de judo. Il vit au Japon durant quinze mois, partageant son temps entre l'Institut et les leçons de français qu'il donne à des étudiants américains et japonais. Peu avant son retour, il obtient le 4e dan de judo et accède ainsi au meilleur niveau européen.


1954 – 1957

À son retour du Japon, il publie en Espagne Yves peintures et à Paris le livre Les Fondements du judo. Ces publications reflètent la double carrière de judoka et d’artiste qu’il mène alors de front.

Au printemps 1955, il propose un monochrome orange intitulé « Expression de l'univers de la couleur mine orange » au Salon des Réalités Nouvelles qui est réservé aux artistes abstraits. De forme rectangulaire, ce panneau de bois est uniformément couvert de peinture orange mate. Il est signé du monogramme YK et daté de mai 1955. Le monochrome est refusé par le jury.

En octobre se tient la première exposition publique Yves Peintures, au Club des Solitaires à Paris. Yves expose des monochromes de différentes couleurs.

En 1956 Yves expose ses œuvres à la Galerie Colette Allendy à Paris, « Yves, Propositions Monochromes ». Durant le vernissage, Klein rencontre Marcel Barillon de Murat, chevalier de l'Ordre des Archers de Saint-Sébastien, qui lui propose de se joindre à eux. Le 11 mars, Yves est adoubé chevalier de l'Ordre des Archers de Saint-Sébastien en l'Eglise de Saint-Nicolas-des-Champs à Paris. Il prend comme devise : Pour la couleur! Contre la ligne et le dessin!

Yves Klein fait la connaissance d'Iris Clert, qui animait une petite galerie de 20 m2, située au 3, rue des Beaux-Arts, à Paris.

L’année 1957 marque le début de son « Époque bleue ».
Au cours de cette année, Yves met au point la fabrication de la couleur qu’il dénommera l’IKB (International Klein Blue) caractéristique des œuvres de son « Epoque bleue » et qui sera jusqu’en 1959 sa signature.
Présentée en janvier 1957, l’exposition « Yves Klein, Proposte monocrome, epoca blu » à la Galleria Apollinaire, à Milan consiste en onze Monochromes bleus de même format suspendues par un système d'équerres à une distance de 20cm du mur, saturant l'espace restreint de cette galerie de petites dimensions.

En mai 1957, Yves présente une double exposition, à la Galerie Iris Clert, à Paris, d'une part Yves, Propositions monochromes, du 10 au 25 mai, d'autre part à la Galerie Colette Allendy, Pigment pur, du 14 au 23 mai.

- Chez Iris Clert, Yves choisit de présenter ses Propositions monochromes comme il l'avait fait à Milan. L'avènement de L'Epoque bleue est célébré par un lâcher de 1001 ballons bleus dans le ciel de Paris lors de l'inauguration. Klein qualifiera ce geste de Sculpture aérostatique.

- Chez Colette Allendy, Yves présente un ensemble d'œuvres annonçant ses développements futurs : Sculptures, environnement, bacs de pigment pur, paravent, la première peinture de feu, Feux de Bengale-tableau de feu bleu d'une minute (M 41) et le premier Immatériel : une salle a été laissée entièrement vide en témoignage de la présence de la sensibilité picturale à l'état matière première. L'invitation commune aux deux expositions porte un texte de Pierre Restany et est affranchie avec un timbre bleu réalisé par Yves Klein.

En juin 1957, l’exposition « Yves, propositions monochromes » inaugure la galerie Schmela de Düsseldorf avec des peintures monochromes de couleurs différentes. Lors de cette exposition, Yves Klein se lie aux artistes du groupe ZERO (Otto Piene et Heinz Mack) ainsi qu'avec la jeune scène artistique de Düsseldorf.

En juillet, se tiendra l’exposition « Monochrome Propositions of Yves Klein » à la Gallery One de Londres. Sont exposées des peintures monochromes de couleurs différentes.

Durant l’été, Yves rencontre Rotraut Uecker (Rerik, 1938) à Nice. Artiste allemande qui travaille comme jeune fille au pair chez Arman et qui deviendra son assistante, puis son épouse.  


1958 – 1960

Lauréat d’un concours international lancé en 1957 par la municipalité de la ville de Gelsenkirchen en Allemagne, Yves Klein reçoit la commande d’un ensemble de Reliefs Eponges et de panneaux monochromes monumentaux.

Au même moment, Yves Klein cherche à aller au-delà d’une définition convenue de l’art : il expose des espaces vides, fait des déclarations à valeur d’œuvre. L’Immatériel que l’artiste « spécialise » est l'objet de transactions en échange d’or, à la fois métal noble et couleur, qui prend alors une place singulière dans son travail.

Les Monogolds ont été réalisés entre 1960 et 1961, faisant intervenir l'or fin dans leur composition, matériau aussi précieux que symbolique. Certains Monogolds réunissent des séries de rectangles assemblés en grilles ; d'autres sont composés de feuilles d'or mobiles fixées sur un panneau recouvert d'or bruni et qui frémissent au moindre souffle ; enfin, certains sont des reliefs concaves dans lesquels les feuilles d'or couvrantes ont été soigneusement polies jusqu'à acquérir un réel pouvoir de réflexion.

Sa collaboration avec l'architecte Claude Parent pour le projet d’Architecture de l’air fera date.

Le 19 mai 1960 Klein dépose la formule du bleu qu'il a mise au point sous le nom International Klein Blue (IKB).

L’espace public (illumination de l’obélisque de la place de la Concorde) et les médias (édition de Dimanche 27 novembre 1960) apparaissent, grâce à lui, comme autant de nouveaux territoires de l’art.

Forces et éléments naturels deviennent aussi la matière première de ses Cosmogonies, marques d'Etats-moments de la nature.

Sa réflexion sur l'art l’amène à imaginer de nouveaux rapports avec ses modèles qui deviennent les « pinceaux vivants » des Anthropométries, marques des "Etats-moments de la chair"..

Le 19 octobre 1960, Yves Klein réalise Le Saut dans le vide, 3 rue Gentil-Bernard à Fontenay-aux-Roses, qui est photographié par Harry Shunk et John Kender.

Le 27 octobre 1960, dans son appartement a lieu la signature du manifeste des Nouveaux Réalistes. La Déclaration constitutive du groupe des Nouveaux Réalistes rédigée par Pierre Restany est signée par Arman, Dufrêne, Hains, Klein, Raysse, Restany, Spoerri, Tinguely et Villeglé. César et Rotella ont été invités mais sont absents.


1961 – 1962

Artiste radical, Yves Klein constitue un modèle pour les artistes européens du groupe Zero.

En janvier 1961, le Museum Haus Lange de Krefeld propose la première rétrospective institutionnelle de son œuvre, intitulée « Yves Klein :  Monochrome und Feuer ». Yves Klein y expose des monochromes bleu, rose et or, les Dessins-architecture, le Mur de Feu. Le 26 février, date de la fermeture de l'exposition, Klein réalise les premières Peintures de feu.

En février 1961, Yves Klein se rend à Cascia en Italie, pour déposer un ex-voto au monastère de Sainte-Rita. L'objet sera retrouvé en 1980 dans le dépôt des offrandes du monastère.

Entre mars et juillet 1961, Yves Klein réalise des Peintures de Feu au Centre d’essai de Gaz de France près de Paris. Prolongement des Cosmogonies et des Anthropométries, les Peintures de feu sont la marque des "Etats-moments du feu".

N’hésitant pas à prendre son image et sa vie privée comme matériaux de son art,

Le dimanche 21 janvier 1962 a lieu le mariage d’Yves et Rotraut en l’église Saint-Nicolas-des-Champs à Paris. Tout dans la cérémonie procède d'une mise en scène méticuleusement orchestrée par l'artiste lui-même, avec un réel souci du rituel.

Alors qu’il entreprend des Portraits Reliefs de ses amis Arman, Claude Pascal et Martial Raysse, il décède d’une crise cardiaque à son domicile, le 6 juin 1962, à l’âge de 34 ans. Son fils Yves naît en août, à Nice.

Yves Klein repose dans le petit cimetière de La Colle-sur-Loup (Alpes-Maritimes), aux côtés de Marie et Rose Raymond.